Haut potentiel intellectuel et psychothérapie

Le Haut Potentiel Intellectuel

Le Haut Potentiel Intellectuel (HPI) correspond au fait de posséder des capacités cognitives très supérieures à la moyenne des personnes du même âge.
En tant que psychologue, ma vision du Haut Potentiel Intellectuel est une vision non pathologique. Je ne le considère pas comme un problème en soi, mais comme un élément qui peut être pris en compte dans la compréhension globale du fonctionnement de la personne et dans la compréhension de ses éventuelles difficultés passées ou présentes. Ainsi, je vois le Haut Potentiel Intellectuel d’abord comme une ressource sur laquelle la personne peut s’appuyer dans sa psychothérapie et plus généralement dans sa vie. Pour autant, le HPI peut jouer un rôle (ou avoir joué un rôle à certains moments de la vie) dans les difficultés de la personne qui vient consulter et il peut être intéressant de l’identifier.
Vous trouverez une sélection de livres recommandés sur le HPI sur la page Livres sur le Haut Potentiel Intellectuel (HPI)

Haut Potentiel Intellectuel et psychothérapie

Le haut potentiel intellectuel modifie-t-il la prise en charge en psychothérapie ?

Psychothérapie du HPI

La question de l’impact du Haut Potentiel Intellectuel sur la psychothérapie est au cœur de l’intervention que j’ai réalisée lors du webinaire « Psychologie du haut potentiel » qui s’est déroulé le 24 juin 2021. Cet événement était principalement destiné aux professionnels de l’accompagnement. L’événement était organisé par De Boeck Supérieur, Mensa Be, Mensa Youth Be, Oct-Opus formations et PREBS.info pour la sortie du livre « Psychologie du haut potentiel« .
Vous trouverez ci-dessous la vidéo et la transcription de mon intervention.

Question : Le haut potentiel modifie-t-il la prise en charge en psychothérapie ? Quels éléments prendre en compte dans le processus thérapeutique ? Quels conseils donner au praticien pour intégrer le haut potentiel dans sa pratique ?

Transcription de la vidéo :

Le haut potentiel modifie-t-il la prise en charge en psychothérapie ? Quels éléments prendre en compte dans le processus thérapeutique ?

La question du Haut Potentiel Intellectuel (HPI) va bien sûr avoir une influence sur certains aspects de la psychothérapie mais elle ne va pas changer radicalement la méthode globale ou l’approche psychothérapeutique en elle-même [à titre personnel je pratique la Thérapie Comportementale et Cognitive]. Autrement dit, il n’y a pas de méthode de thérapie spécifique au haut potentiel intellectuel. Simplement, le contenu et le déroulement de la thérapie vont être adaptés par le psychothérapeute pour correspondre à chaque personne et notamment à ses éventuelles capacités intellectuelles élevées. La question du haut potentiel viendra donc colorer l’accompagnement.

Et elle le fera de plusieurs façons :

1) Tout d’abord dans son contenu. Si l’on prend l’exemple d’une personne qui vient consulter parce qu’elle repousse depuis une dizaine d’années son projet de reconversion professionnelle, disant qu’elle manque de confiance en elle, qu’elle manque de confiance en ses capacité, alors qu’elle a toujours eu des bons résultats dans ses activités, alors la question des capacités intellectuelles élevées pourra être un levier important pour la thérapie.
De la même manière, si une personne à haut potentiel intellectuel a la croyance d’être profondément anormale, on cherchera sur la base de quelles expériences et par quels cercles vicieux cette croyance s’est renforcée au fil du temps pour la personne. Jusqu’à devenir finalement assez rigide puisqu’elle devient handicapante pour le quotidien de la personne. On verra quelle est la contribution du haut potentiel intellectuel dans la construction de cette croyance. Et surtout, on pourra chercher à l’assouplir. Assouplir cette croyance pour permettre le changement, pour permettre que des choses qui n’étaient plus [ou n’ont pas encore été] possibles le (re)deviennent.

2) Le haut potentiel intellectuel pourra aussi colorer le processus et le déroulement de la psychothérapie en elle-même. Les capacités élevées vont pouvoir être utilisées par le thérapeute pour favoriser le changement souhaité.
On peut voir que parfois la personne identifiera ou comprendra certaines choses plus vite qu’un patient plus classique. Et en tirera des conséquences plus rapidement. Le thérapeute pourra aussi parfois choisir de donner des explications plus approfondies, en particulier quand la personne qui consulte a envie ou besoin de mieux comprendre pour s’engager dans l’action. Dans tous les cas il s’agit d’abord de s’adapter au rythme de la personne et à ce qui permet de l’aider à mettre en place les changements souhaités.
Parce que, bien entendu, si à l’inverse le praticien et la personne qui consulte utilisent leur intelligence pour éviter les sujets émotionnels, pour éviter les sujets importants, pour faire une joute oratoire, des combats d’arguments sans fin, cela va être contre-productif. La thérapie ne va pas avancer, on ne va pas permettre le changement.

Quels conseils donner au praticien pour intégrer le haut potentiel dans sa pratique ?

Premièrement, et ça me semble important, que les praticiens s’appuient sur ce qu’ils savent déjà faire et ce qu’ils font bien, indépendamment de la question du Haut Potentiel Intellectuel. Il n’y a pas de raison que tout soit différent parce qu’il est question de Haut Potentiel Intellectuel. Il me paraît donc important que les praticiens s’appuient sur le champ théorique et les outils qu’ils utilisent habituellement et qu’ils maîtrisent. Et s’ils sentent que ces outils ne leur suffisent pas, voir s’ils ont besoin de se former, de les approfondir, voire de changer d’approche thérapeutique si finalement ça ne leur correspond plus.

Deuxième élément : se tenir à jour et tenir à jour leurs connaissances sur le Haut Potentiel Intellectuel, avec des sources fiables [cliquer ici pour consulter une sélection de livres sur le HPI]. Déjà pour pouvoir être soi-même au clair avec les différents éléments, et ensuite pour éviter d’entretenir des fausses croyances ou de véhiculer des mythes. Que cela soit vis-à-vis de leurs patients ou dans les questions d’identification.

Troisièmement, ne pas oublier de mener une démarche différentielle, c’est à dire d’envisager d’autres hypothèses pour expliquer les difficultés. Que la personne qui consulte ait un Haut Potentiel Intellectuel ou pas, il est important de ne pas trop se focaliser sur la question du Haut Potentiel, au risque de masquer des questionnements sur d’autres éléments. Et notamment de pouvoir passer à côté d’explications alternatives ou complémentaires. Des questions, par exemple, d’anxiété sociale, de trouble de la personnalité, de TDAH, etc.

Quatrièmement, il me paraît important de réfléchir à la place donnée à un éventuel test de QI dans la psychothérapie. Un test de QI, c’est pas automatique, ça ne se fait pas à n’importe quel moment et pas dans n’importe quelles conditions. On peut réfléchir avec le patient à quelle(s) question(s) on va chercher à répondre par ce test ? En quoi est-ce que cela va aider la personne à avancer à ce moment là de l’accompagnement ? Parfois les thérapeutes vont être pressés d’envoyer la personne passer un test de QI. Peut-être que c’est le bon moment, peut-être que ce n’est pas le bon moment. Tout ça va être notamment un aspect stratégique. Comment ça va devenir un levier pour la thérapie.

Si on résume :
– des compétences psychothérapeutiques de base solides pour le thérapeute
– des connaissances à jour sur le Haut Potentiel
– une démarche différentielle
– et l’utilisation thérapeutique du test de QI

Et sur ces bases, on peut intégrer la question du haut potentiel à la compréhension globale de la personne : la place du haut potentiel dans son histoire de vie, la place du haut potentiel dans le développement de ses croyances, la place du haut potentiel dans les situations qui lui posent problème actuellement, et surtout le haut potentiel comme ressource actuelle [c’est à dire comme élément sur lequel s’appuyer] pour permettre de cheminer vers une vie plus satisfaisante. Parce que l’objectif d’une psychothérapie, ça reste de permettre le changement [vers une vie plus satisfaisante].

Cette intervention a été réalisée par Nicolas FRANCOIS, psychologue TCC en visioconférence et à Rueil-Malmaison