Anxiété sociale (phobie sociale)

Cette présentation de l’anxiété sociale est destinée aux professionnels. Elle utilise donc parfois un vocabulaire technique. Ce texte est issue de mon mémoire de formation à la Thérapie Cognitive et Comportementale

par Nicolas FRANCOIS, psychologue TCC en ligne et à Rueil-Malmaison. Dernière mise à jour : 2018.

Manifestations de l’anxiété sociale

L’anxiété sociale, ou phobie sociale est un trouble mental dont la caractéristique principale est une « peur ou anxiété intenses d’une ou plusieurs situations sociales durant lesquelles le sujet est exposé à l’éventuelle observation attentive d’autrui » (American Psychiatric Association et al., 2015, p. 237). Les deux émotions fondamentales de l’anxiété sociale sont la peur, généralement avant et pendant les confrontations, et la honte, pendant et après. Les situations de peurs sociales peuvent en outre être regroupées en cinq grandes catégories : les situations de performance, d’observation, d’affirmation, de révélation de soi et d’interactions (André, 2011).

Épidémiologie, étiopathogénie et retentissement

L’estimation de la prévalence de l’anxiété sociale est très variable en fonction des critères diagnostiques et des instruments d’évaluation utilisés (Fehm, Pelissolo, Furmark, & Wittchen, 2005). On note également de grands écarts entre les pays, avec une prévalence à 12 mois estimée à environ 7% aux États-Unis, bien supérieure aux chiffres obtenus avec le même instrument diagnostique dans une grande partie du monde, autour de 0,5% à 2,0%. La prévalence médiane est estimée à 2,3% en Europe (American Psychiatric Association et al., 2015). En France, elle est estimée à 1,7 % sur 12 mois et à 4,7% vie entière (HAS, 2007). Le sex-ratio est d’environ 1,5 à 2,2 femmes pour un homme en population générale, tandis qu’il est équilibré ou légèrement supérieur chez les hommes dans les échantillons cliniques (American Psychiatric Association et al., 2015; Fehm et al., 2005).

L’anxiété sociale apparaît le plus souvent dans l’enfance ou à l’adolescence et dans ce cas se développe alors progressivement, même si une expérience stressante ou humiliante peut rester mémorisée comme un début soudain des troubles (American Psychiatric Association et al., 2015; Pelissolo, 2016). Elle peut devenir chronique en l’absence de traitement (American Psychiatric Association et al., 2015; Fehm et al., 2005). Les facteurs de risque sont tempéramentaux, notamment l’inhibition comportementale et la peur d’être jugé négativement, mais aussi environnementaux, comme la maltraitance ou des difficultés psychosociales précoces. L’influence génétique dépend de l’interaction gène-environnement et donc notamment du modèle d’anxiété sociale présenté par les parents (American Psychiatric Association et al., 2015). Les données actuelles de la recherche vont dans le sens d’un modèle bio-psycho-social où les prédispositions tempéramentales sont modulées par des influences environnementales et où les facteurs sociaux jouent dans la révélation du trouble (André, 2011).

Bien que le retentissement de l’anxiété sociale soit conséquent en terme d’abandon scolaire, de perte de bien-être, d’emploi, de productivité au travail, de statut socio-économique et de qualité de vie, seule la moitié des personnes souffrant d’anxiété sociale dans les sociétés occidentales est soignée, et seulement après 15 à 20 ans d’évolution (American Psychiatric Association et al., 2015). Cela s’explique notamment par la pathologie elle-même, dont les symptômes ne gênent que la personne concernée, qui aura du mal à en parler et tentera plutôt de les dissimuler (André, 2011; Pelissolo, 2016). L’intensité du trouble dépend du nombre de situations sociales concernées, du degré d’évitement et des troubles associés (Mirabel-Sarron & Vera, 2012).

Anxiété sociale, comorbidités et estime de soi

Les comorbidités sont très fréquentes et seraient de l’ordre de 69 % à 92 % à vie entière (Fehm et al., 2005). Les comorbidités les plus présentes sont les troubles dépressifs (environ 50 %), les autres troubles anxieux comme le trouble panique (40 %) et les addictions (15 %) (Pelissolo, 2016).
L’anxiété sociale entraîne couramment une baisse de l’estime de soi, qui peut à plus long terme entraîner une dépression (Mirabel-Sarron & Vera, 2012). André (2011) souligne également que des troubles de l’estime de soi sont quasi constants dans l’anxiété sociale et entraînent des perturbations cognitives centrées sur l’autodévalorisation punitive.

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Références bibliographiques

American Psychiatric Association, Guilabert, C., Guelfi, J.-D., Crocq, M.-A., Boyer, P., Pull, C.-B., Pull, M.-C., Abbar, M., Arbabzadeh-Bouchez, S., Benyamina, A., Boehrer, A., Boulenger, J.-P., Brichant-Petitjean, C., Butlen-Ducuing, F., Chauvet-Gelinier, J.-C., Clément, J.-P., Corruble, E., Courtet, P., Beaurepaire, R. de, … Wolgensinger, L. (2015). DSM-5—Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux.

André, C. (2011). La phobie sociale. In Guide clinique de thérapie comportementale et cognitive (p. 265‑300). Retz.

Fehm, L., Pelissolo, A., Furmark, T., & Wittchen, H.-U. (2005). Size and burden of social phobia in Europe. European Neuropsychopharmacology, 15(4), 453‑462.

HAS. (2007). Guide—Affections psychiatriques de longue durée : Troubles anxieux graves.

Mirabel-Sarron, C., & Vera, L. (2012). Comprendre et traiter les phobies : Phobies de l’enfant et de l’adulte, phobies spécifiques et phobies complexes, Dunod.

Pelissolo, A. (2016). Anxiété sociale et phobie sociale. EMC – Psychiatrie, 13(4), 1-6 [Article 37-370-A-20].